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HAUTE ANTIQUITE

Expansions, Dispersions et Métissages
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Anciens peuples sémitiques

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LA LEGENDE DU DELUGE ET LES ANCIENS PEUPLES SEMITIQUES (chap.VI)

Avant d'aborder l'histoire des anciens rapports des Sémites ou Syro-Arabes avec les chevaux, nous dirons un mot sur la légende purement sémitique du déluge universel, parce qu'elle a été le plus souvent mal interprétée, et qu'elle fournit l'une des preuves que la civilisation des Sémites s'est développée à une époque où ils n'avaient point de relations avec les Aryas ni avec les Mongols.

Cette légende a longtemps fait admettre que tous les peuples de la terre descendent d'un seul chef de famille, nommé Xisuthrus par la tradition chaldéenne, Noé par la tradition hébraïque, ..........

[....] Une étude attentive et impartiale de la question montre d'ailleurs qu'avant leurs premiers rapports avec les Sémites, les autres peuples n'avaient pas la tradition d'un déluge universel;
ils avaient seulement le souvenir traditionnel d'inondations partielles, comme il s'en produit dans beaucoup de régions du globe, à toutes les époques de l'histoire, même les plus récentes.

Bien d'autres faits prouvent que les Sémites ont acquis les premiers rudiments de leur civilisation à une époque où ils n'avaient encore aucun contact ni avec les Aryas ni avec les Mongols.

L'histoire du cheval chez les Sémites conduira au même résultat dans les chapitres suivants.

Tout indique que les Sémites sont originaires de la péninsule Arabique, ou, en d'autres termes, que c'est là que naquit leur civilisation, qui atteignit surtout son entier développement à proximité de cette péninsule, tant dans le sud-ouest de l'Asie que dans le nord-est de l'Afrique, chez les anciens peuples d'origine sémitique, connus sous les noms de Koushites, Chaldéens, Assyriens, Cananéens, Phéniciens, Carthaginois, Hébreux, Israélites, etc.

Suivant la judicieuse remarque de
Creutzer et Guigniaut, rappelée par M. Maspéro à la page 147 de son Histoire ancienne,

"les Koushites, cette branche ancienne de la famille sémitique, partie la première du berceau commun, la première aussi parmi cette foule de hordes longtemps nomades, se fixa, puis s'éleva à la civilisation, pour devenir à ses frères demeurés nomades un objet d'envie et d'exécration tout à la fois."

Il a déjà été dit peuples mongoliques (hab1) que, par leur mélange avec des populations mongoliques, les Koushites contribuèrent à former les plus anciens Etats connus de la Susiane et de la Chaldée, qui furent d'abord gouvernés par une aristocratie mongolique.

Mais, comme le dit M.Oppert dans son Hist. de Chaldée et d'Assyrie, p. 5-6,

"vers l'an 2000 avant l'ère vulgaire, des populations sémitiques conquérantes, qui depuis quelques siècles déjà avaient pris possession du pays arrosé par le Tigre et l'Euphrate, étaient assez puissantes pour y établir leur domination définitive...
Les conquérants, désignés par la Genèse (X,22) sous le nom générique d'Assour, fils de Sem, occupèrent bientôt toute la contrée de la Mésopotamie, ainsi que les rives orientales du Tigre et occidentales de l'Euphrate....
déplacé tantôt du midi, où il avait pris naissance, au nord, tantôt du nord au sud, l'empire sémitique de la Mésopotamie s'appelle, selon ces changements, empire chaldéen ou empire assyrien.
Le culte, les moeurs, le langage, l'étendue de ces deux royaumes restent essentiellement les mêmes."

Piétrement 1882

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C'est Assour, c'est à dire la tribu sémitique souche des Assyriens, qui avait fondé Ninive (Genèse, X, 11), en assyrien
Ninoua, "la demeure", dès une époque qui se perd dans la nuit des temps;

et, longtemps après que la prépondérance de l'élément sémitique eût succédé à celle de l'élément mongolique en Mésopotamie, le début de la puissance des Assyriens ou Ninivites fut personnifié dans la tradition sous les figures de Ninus et de sa femme Sémiramis: personnages légendaires auxquels on attribua, en les exagérant, les exploits des chefs qui établirent la prépondérance des Assyriens.

Ce n'est du reste que plusieurs siècles après l'établissement définitif de la domination des Sémites en Mésopotamie que leur puissance parvint à son apogée, par suite des conquêtes des souverains du grand empire assyrien, qui dura 520 ans d'après Hérodote (I, 95), de l'an 1314 à l'an 788 avant notre ère, suivant
M. Oppert (Hist. de Chaldée et d'Assyrie, p. 41), c'est à dire jusqu'à la première destruction de Ninive par le Babylonien Phul-Balazou, le Bélésis des auteurs grecs.

Les Cananéens ou Phéniciens ont certainement eu l'Arabie pour première patrie; car
"la tradition des Phéniciens, recueillie à Tyr par Hérodote voyez Hérodote, VII, 89., si soigneux et si intelligent dans le choix de ses sources d'information, acceptée également par le judicieux Trogue Pompée (voyez Justin, XVIII, 3), celle des habitants de l'Arabie méridionale dont Strabon s'est fait le rapporteur, (Voyez Srabon, liv XVI, ch IV, § 27) enfin celle qui avait encore cours dans la Babylonie aux premiers siècles de l'ère chrétienne, alors que fut rédigé l'original syro-chaldaïque du livre de l'Agriculture nabatéenne, s'accordent toutes les trois pour dire que les Cananéens avaient habité primitivement tout auprès des Koushites, leurs frères d'origine, sur les rives de la mer Erythrée ou golfe Persique, dans la portion de la côte d'Arabie qui sur nos cartes porte le nom d'El-Katif " (F. Lenormant, Hist. anc. de l'Orient, t.III, p.3).

Hérodote dit en outre (I, 1) que cette opinion était également professée par les anciens doctes de la Perse;
et
Strabon dit aussi (liv. XVI, chap.III, §4), dans la description de deux îles du golfe Persique qui sont les îles Barheïn des géographes modernes :

" Pour peu qu'on s'avance au delà de Gerrha, on rencontre encore d'autres îles, à savoir Tyr et Aradus, lesquelles renferment des temples fort semblables d'aspect aux temples phéniciens. Les habitants prétendent même que leurs deux îles sont les métropoles des îles et des villes de mêmes noms qui dépendent de la Phénicie."

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"Bientôt après la conquête, les tribus cananéennes s'étaient séparées en deux groupes.
Les unes s'étaient répandues dans les vallées de l'intérieur, de l'Amanos au Seir, et dans les plaines qui s'étendent au sud du mont Carmel jusqu'au désert, et à la frontière d'Egypte.
Les autres s'étaient logées le long des côtes entre le Carmel et l'embouchure de l'Oronte, le mont Liban et la mer.

La différence des sites amena entre ces deux groupes une différence de moeurs et de caractère.
Les Cananéens de l'intérieur, agriculteurs ou pasteurs selon les localités, se subdivisèrent en un grand nombre de tribus sans cesse en guerre les unes contre les autres.
Les Cananéens de la côte, étouffés entre la montagne et la mer, se firent marins et commerçants.
L'antiquité classique donnait aux Cananéens de la côte le nom de Phéniciens.
Selon certaines traditions grecques, ils avaient été appelés ainsi de Phénix, fils d'Agénor et fondateur de la race.
Selon divers auteurs, Phoenikes signifiait simplement le peuple rouge, soit en souvenir de la mer Rouge (Erythrée), aux bords de laquelle ils avaient habité si longtemps, soit à cause des fabriques de pourpre qu'ils établirent dans toute leurs colonies, soit enfin par allusion à la teinte de leur visage.
L'opinion la plus reçue jusqu'à ces derniers temps voit dans Phoenix le nom du palmier, et dans Phoenikia le Pays des Palmes.
En fait, Phoenix est une forme élargie de Phoun (Poeni, Puni), vieux nom national que les Cananéens portaient dans leur patrie primitive et qui les suivit dans toutes leurs migrations.
Les monuments egyptiens les plus anciens identifient les régions orientales de l'Arabie au pays de Pount; les Cananéens du golfe Persique firent passer le nom de Phénicie en Syrie, les Phéniciens de Syrie le menèrent en Afrique, et les Phéniciens d'Afrique (Poeni) le répandirent jusque dans leurs colonies les plus lointaines."
(Maspéro, Hist. anc.p.188-189).

Piétrement 1882

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Dès une époque qui se perd dans la nuit des temps, d'autres Koushites s'étaient établis à l'est du détroit d'Ormus, sur tous les rivages de la mer des Indes jusqu'aux côtes de Malabar, tandis que d'autres encore avaient franchi le détroit de Bab-el-Mandeb et s'étaient fixés dans le bassin du Nil-Bleu, où leur postérité, "Koush la vile" des textes hiéroglyphiques, fut pendant des siècles l'ennemie acharnée des Egyptiens.
(Clef. Maspéro, Hist.anc. p 145-146).

Il est vrai qu'à la page 145 de son Histoire ancienne, M. Maspéro place le berceau des Koushites en Bactriane,

"au pied de la montagne qui sépare les plaines de Boukharie du plateau de l'Iran et qui porte encore le nom d'Hindou-Koush";

et il ajoute à la page 147, qu'en arrivant sur les rives du Tigre et de l'Euphrate, les Sémites

"apportaient avec eux le souvenir de leur patrie transoxienne et du grand déluge qui les en avaient chassés."

M. Maspéro nous paraît ici amalgamer la légende sémitique du déluge avec la théorie d'Adhémar sur les cataclysmes périodiques; mais, en tout cas, son assertion est entièrement gratuite;
car, l'existence du mot Hindou-Koush pourrait seule lui donner un point d'appui solide, et tel n'est pas le nom de la montagne en question. Ce nom n'est pas non plus Hindou-Kho, écrit ainsi par erreur à la page 157, et d'ailleurs fort usité, quoique très défectueux.
Le vrai nom est Hindou-koh, dans lequel l'h finale actuelle remplace une ancienne f.
Le mot est du reste purement aryen, et koh signifie "montagne", surtout "haute montagne."
Hindou-Koh signifie donc "Caucase Indien", comme Kohistan signifie "pays montagneux"; et ces deux mots n'ont pas plus l'un que l'autre le moindre rapport avec le nom des Koushites.

Enfin, si l'on fait abstraction de la légende du déluge, on constate que, d'après les chapitres XI et XII de la Genèse, la plus ancienne migration des Hébreux dont le souvenir ait été conservé partit elle-même des environs du golfe Persique; et l'on ne peut qu'approuver ces paroles de M. Maspéro:

"Chassées d'Our, les tribus sémitiques, jusqu'alors établies dans la Chaldée méridionale, avaient remonté le cours de l'Euphrate sous la conduite du légendaire Tharé et s'étaient fixées sur la rive gauche du fleuve près de Kharrân, en Mésopotamie.

Bientôt après, une partie d'entre elles franchit l'Euphrate avec un chef que la tradition appelle Abram ou Abraham et, sous le nom d'Hébreux, "les gens d'au delà du fleuve", traversa la Syrie dans toute sa longueur, du nord au sud.

Les gens d'Abram se fixèrent aux alentours de Kiriath-Arba ou Hébron et rayonnèrent de là sur toute la terre de Canaan.

Les une passèrent le Jourdain et formèrent les tribus de Moab et d'Ammon; les autres s'enfoncèrent dans le désert méridional, où ils se mêlèrent aux Edomites.

Le reste prit du surnom mystique d'un de ses chefs, le nom de Benou-Israël, sous lequel il s'est rendu célèbre, et, après avoir longtemps promené ses tentes à travers les plaines et les montagnes de Canaan, descendit en Egypte avec tous les biens de la tribu....

La tradition place leur descente en Egypte sous un des rois Pasteurs qu'elle nomme Aphobis.
C'est évidemment l'un des Apapi, peut-être celui-là même qui embellit Tanis et dont M. Mariette a retrouvé les monuments."
(Maspéro, Hist. anc. p 173-174).

Piétrement 1882

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