EPOREDO

accueil

ANTIQUITE

Origines du cheval mongolique et peuples mongoliques de l'orient

plan2

Habitudes hippiques
.
.....

N.B.:

Nous suivons le plan de Piétrement selon lequel, à l'imitation des auteurs grecs antiques, tous les nomades "du nord" (scythes pour Strabon) ont été classés ensemble dans la catégorie "mongolique".

Or, comme l'auteur l'a lui-même suspecté et souligné : il y en a en fait de diverses origines: deux principalement :

les uns "tudesques aryanisés" (voire même carrément aryens, c'est à dire, pour nous, tout à fait "indo-européens")

les autres, effectivement mongoliques.

cheval de Mongolie, en argent
1er siècle de notre ère, (coll.Ordos, ph. BM)

Il se trouve que ceux qui ont été le mieux connus des Grecs anciens sont plutôt dans la première catégorie.
Par conséquent, cette page traite de ces deux sortes de populations, dont les pemiers cités ne devraient pas y être classés.

On notera d'ailleurs les importantes différences d'aspect et de moeurs que reflètent les citations concernant les uns et les autres.
Les chevaux des illustrations de cette première catégorie sont plutôt de type "aryen".


Sarmate (BM)

     
     
     


   
   


Habitudes hippiques des peuples mongoliques (chapV, §5)

Les littérarures grecque et latine donnent sur les habitudes hippiques des anciens peuples mongoliques des renseignements dont quelques-uns méritent d'être rappelés.

Dès l'époque de Cyrus, les Masssagètes ou Grands-Gètes habitaient la partie du domaine actuel des Kirghises qui est située au nord-est de la mer Caspienne et du lac d'Aral
(Hérodote, I, 200-204).

Leur nom est l'équivalent exact du mot chinois Ta-Youei-ti et ils étaient incontestablement de race mongolique (Voyez
Beauregard, Kachmir et Thibet, dans les Bulletins de la Soc. d'anthrop. de Paris, année 1882, p. 253-258.).

Hérodote les dépeint ainsi

" Les Massagètes portent un costume semblable à celui des Scythes et ont le même genre de vie;
ils sont cavaliers et piétons, car ils combattent de deux manières; ils sont archers et piquiers et font usage de haches. Ils n'emploient que l'or et l'airain. Les pointes de leurs javelots et leurs flèches, leurs haches, sont d'airain; les parties métalliques de leurs casques, de leurs tiares, de leurs bretelles et de leurs ceintures sont en or.
Pareillement, autour du poitrail de leurs chevaux, ils placent des cuirasses d'airain, tandis que le métal des brides, des mors, des harnais, est d'or. Ils ne se servent ni d'argent ni de fer, car il ne s'en trouve pas dans leur contrée, mais l'or et l'airain y abondent.
" Voici leurs usages. Chacun épouse une femme, mais ils usent de toutes en commun... Quand l'un d'eux désire une femme, il suspend son carquois devant son char et s'unit tranquillement à elle.
Ils n'ensemencent point; ils vivent de leur bétail et des poissons que l'Araxe leur fournit en abondance; ils ne boivent que du lait.
Le Soleil est le seul dieu auquel ils rendent un culte; ils lui sacrifient des chevaux; au plus rapide des dieux ils offrent le plus rapide des êtres mortels"
(Hérodote, I, 215-216.)


Puisque les anciens désignaient sous le nom de Scythes l'ensemble des peuples nomades, tant mongoliques que tudesques aryanisés, qui habitaient alors la Russie et l'Asie transcaucasique, on peut appliquer aux uns et aux autres les renseignements suivants qu'
Hérodote donne sur les Scythes:

"L'affaire la plus importante de toutes est ainsi réglée chez eux : nul de ceux qui les envahissent ne peut effectuer sa retraite, et, s'ils ne veulent pas qu'on les trouve, nul n'est capable de les atteindre.
Car ils n'ont ni villes ni remparts fixes, mais ils emportent avec eux leurs demeures; ils sont tous archers à cheval; ils vivent, non de labourage, mais de bétail; leurs demeures sont sur des chars: comment ne seraient-ils pas inattaquables et d'un commerce difficile?"
(Hérodote IV 46)

Hérodote dit plus loin que les Scythes étranglaient un certain nombre de chevaux, avec des cérémonies qu'il décrit, aux funérailles et au premier anniversaire de la mort de leurs rois (IV, 71-72);
qu'ils sacrifiaient annuellement du menu bétail et des chevaux au dieu Mars, représenté par un cimeterre dressé sur un monceau de fascines (IV, 62), et qu'aux autres dieux ils immolaient toute espèce de bétail, mais surtout des chevaux (IV, 61).
Il est à peine besoin d'ajouter que, dans ces sacrifices d'animaux, tout l'honneur était pour les dieux et tout le profit pour les Scythes; car, Hérodote le fait remarquer, la victime étranglée au moyen d'un lacet placé autour du cou, était immédiatement écorchée, puis on s'occupait de la faire cuire (IV, 60); et l'on jetait seulement au loin, comme prémices, une part accompagnée des entrailles (IV, 61).
C'était évidemment la part laissée aux chiens, et c'était de toute justice, puisque Hérodote nous apprend que les Scythes étaient le plus souvent obligés, faute de bois, de faire brûler les os de la victime pour en cuire la chair (IV, 61).

Piétrement 1882

images d'art scythes
(ph. www://studentorgs.utexas.edu/husa)


peigne


cavalier




torque

 

détails: profil des chevaux

 

 

"le tapis Pazyryk"
(ph Wikimedia. Commons)


détail (ph Wiki.Commons)

tapis trouvé dans la sépulture scythe de Pazyryk, (env 8eme s. avt J.C.), Sibérie méridionale,
où 300 chevaux dont 160 harnachés ont été inhumés avec le mort
.

 
Enfin,
Ammien Marcellin dépeint ainsi les Huns, au moment où ils franchirent la Volga et arrivèrent jusqu'à la rive gauche du Danube (374-376 de notre ère):
"Les Huns sont à peine mentionnés dans les annales, et seulement comme une race sauvage répandue au delà des Palus-Méotides, sur les bords de la mer Glaciale, et d'une férocité qui passe l'imagination.

Dès la naissance des enfants mâles, les Huns leur sillonnent les joues de profondes cicatrices, afin d'y détruire tout germe de duvet. Ces rejetons croissent et vieillisent imberbes, sous l'aspect hideux et dégradé des eunuques.

Mais ils ont tous le corps trapu, les membres robustes, la tête volumineuse; et un excessif développement de la carrure donne à leur conformation quelque chose de surnaturel. On dirait des animaux bipèdes plutôt que des être humains, ou de ces bizarres figures que le caprice de l'art place en saillie sur les corniches d'un pont. Des habitudes voisines de la brute répondent à cet extérieur repoussant.

Les Huns ne cuisent ni n'assaisonnent ce qu'ils mangent, et se contentent pour aliments de racines sauvages ou de la chair du première animal venu, qu'ils font mortifier quelque temps, sur le cheval, entre leurs cuisses.
Aucun toit ne les abrite.... Ils se coiffent de bonnets courbés (en arrière) et entourent de peaux de chèvres leurs jambes velues, chaussure qui gêne la marche et les rend peu propres à combattre à pied.

Mais on les dirait cloués sur leurs chevaux, qui sont infatigables, mais disgracieux.
C'est sur leur dos que les Huns vaquent à toute espèce de soin, assis quelquefois à la manière des femmes.

A cheval jour et nuit, c'est de là qu'ils vendent et qu'ils achètent. Ils ne mettent pied à terre ni pour boire, ni pour manger, ni pour dormir, ce qu'ils font inclinés sur le maigre cou de leur monture, où ils rêvent tout à leur aise.
C'est encore à cheval qu'ils délibèrent des intérêts de la communauté.

L'autorité d'un roi leur est inconnue; mais ils suivent tumultuairement le chef qui les mène au combat.
Attaqués eux-mêmes, ils se partagent par bandes, et fondent sur l'ennemi en poussant des cris effroyables.
Groupés ou dispersés, ils chargent ou fuient avec la promptitude de l'éclair, et sèment en courant le trépas.
Aussi leur tactique, par sa mobilité même, est impuissante contre un rempart ou un camp retranché.
Mais ce qui fait d'eux les plus redoutables guerriers de la terre, c'est qu'également sûrs de leurs coups de loin, et prodigues de leur vie dans le corps à corps, ils savent de plus, au moment où leur adversaire, cavalier ou piéton, suit des yeux les évolutions de leur épée, l'enlacer dans une courroie qui paralyse tous ses mouvements.
Leurs traits (il est à peine besoin de dire que ces "traits" (telis) étaient des flèches. Au reste, dans son Hist. des Goths, ch. XXIV, Jornandès dépeint les Huns :"toujours prêts à se servir de leurs arcs et de leurs flèches" (ad arcus sagittasque parati) sont armés, en guise de fer, d'un os pointu, qu'ils y adaptent avec une adresse merveilleuse.
Aucun d'eux ne laboure la terre ni ne touche une charrue.
Tous errent indéfiniment dans l'espace, sans toit, sans foyer, sans police, étrangers à toute habitude fixe, ou plutôt paraissant toujours fuir, à l'aide de chariots où ils ont pris domicile, où la femme s'occupe à façonner le hideux vêtement de son mari, le reçoit dans ses bras, enfante et nourrit sa progéniture jusqu'à l'âge de la puberté."
(Ammien Marcellin, XXXI, 2.)

Ces citations suffisent pour montrer que les anciens nomades de race mongolique étaient des peuples éminemment équestres, comme le sont encore aujourd'hui ceux de leurs descendants qui ont conservé les mêmes habitudes nomades depuis le Volga jusqu'aux frontières de la Chine, les Kalmouks, les Nogaïs, les Kirghises, les Turcomans, les Kalkas et les Mongols.
Tous sont des cavaliers aussi habiles que vigoureux et intrépides, pouvant supporter avantageusement la comparaison avec n'importe quel autre peuple.

Leur état présent, trop connu par les récits de tous les voyageurs pour qu'il soit besoin de s'y arrêter, indique ce qu'étaient leurs ancêtres soumis aux mêmes conditions d'existence; il explique pourquoi ceux-ci ont joué un rôle si considérable dans l'histoire.
[......]

Piétrement 1882


archer mongol (fich.Wikimedia.Commons.)

.

 
L'hippophagie et la multitude des chevaux chez les peuples mongoliques. (chapV,§6)

Dans ses
Lettres sur les substances alimentaires, Isidore Geoffroy Saint-Hilaire a cité beaucoup de faits relatifs à l'hippophagie, c'est à dire à l'usage alimentaire de la viande, du sang et du lait des divers Equidés, tant domestiques que sauvages, chez les différents peuples de la terre, aussi bien dans l'antiquité et le moyen âge que de nos jours.

Cette partie historique de son livre comprend les lettres VIIe et VIIIe, ainsi que les indications bibliographiques des pages 144 à 151.
Nous y renvoyons faute d'espace, en prévenant toutefois que l'exposé de cet auteur est incomplet en ce qui concerne les temps qui lui sont antérieurs, et que de nouveaux renseignements, fournis par des voyageurs contemporains, sont venus confirmer ce qu'il avait dit du goût prononcé de beaucoup de peuples pour la viande des Equidés en général et du cheval en particulier. Ainsi, par exemple:

"La chair de cheval est le mets le plus estimé des Mongols," au témoignage de Mme de Bourboulon (Le Tour du Monde, t. X, 1864, p.331);
"le Kirghis, qui se détournerait avec dégoût d'une bonne tranche de boeuf, se réjouit à l'idée d'une grillade de cheval", suivant Atkinson
Le Tour du Monde, t.VII, 1863, p.366: et tel est aussi le goût des Kalmouks, d'après Moynet Le Tour du Monde, XV, 1867, p.91-92.

Mais ce qu'il importe surtout de faire remarquer pour notre sujet, c'est que l'hippophagie, encore subsistante chez tous les peuples nomades de race mongolique possesseurs de chevaux et même chez les Chinois, remonte chez eux tous à une époque très ancienne, puisque, on l'a vu aux pages 334 et 353, c'est pour se nourrir que les proto-Mongols ont domestiqué les six animaux dont l'un était le cheval, pendant la période proto-historique que les Chinois ont personnifiée sous le nom de Fo-hi.

De temps immémorial, les peuples mongoliques ont donc estimé les chevaux par-dessus tout, aussi bien pour s'en nourrir que pour les monter; et ce doit être l'une des principales raisons pour lesquelles ils ont toujours été et sont encore les plus riches en chevaux; c'est à dire que, proportionnellement au nombre d'habitants, les chevaux ont toujours été et sont aujourd'hui plus nombreux chez les nomades de race mongolique que chez aucun autre peuple.
[....]
Enfin, pour montrer que ce n'est pas d'aujourd'hui que ces contrées sont si riches en chevaux, nous rappellerons que, dans une ancienne tradition hindoue,

" le pays des chevaux était le nom donné aux pays du nord occupés par les nations nomades que nous désignons sous le nom de Mongols et Tartares;
comme la Chine y était nommée le pays des hommes; l'Inde, le pays des éléphants; la Perse, les pays des trésors
(Rémusat (Abel), Mélanges posthumes, p. 75-76)

et que Strabon disait déjà, liv. XI, ch.V, §8, à propos des Sirakes, des Aorses et autres tribus nomades qui parcouraient, au nord du Caucase, l'espace compris entre le Palus Méotide et la mer Caspienne:

" Abeacos, qui règnait sur ces tribus sirakes dans le temps où Pharnace était roi du Bosphore, pouvait armer 20 000 cavaliers, et Spadinès, roi de ces Aorses (du nord), pouvait en équiper jusqu'à 80 000.
Quant aux Aorses supérieurs, ils disposaient naturellement de forces encore plus considérables, car leur territoire était plus étendu et ils dominaient en outre sur la plus grande partie du littoral occupé naguère par le Caspii."

Piétrement 1882


Combat des Romains contre les Sarmates (cataphractaires) à droite)
détail de la colonne trajane (Rome)
"die reliefs der Traianssaüle", Conrad Cichorius (ph.Wiki
media Commons)

haut