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HAUTE ANTIQUITE

Aryas primitifs
~
première patrie

.....


plan

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La première patrie des Aryas. (chapIII,§4, p143)

Les renseignements suivants, donnés par le premier chapitre ou fargard du Vendidad, indiquent dans quelle direction il faut chercher la première patrie des Aryas, que ce livre nomme l'Airyana vaedja, l'Aryane de l'origine, ou « la terre productrice des Aryas, le berceau de la race aryaque », suivant l'expression de Harlez (Avesta, 1.1, p. 82).
Ormuzd crée d'abord pour les peuples anaryens une terre, lieu d'agrément, où tout pourtant n'était pas joie, qui n'avait pas tous les agréments de la fertilité

« car, dit Ormuzd, si je n'avais pas créé ce lieu d'agrément où tout n'était pas joie, tout le monde corporel se serait transporté dans l'Airyana vaedja. »
Puis, en faveur de son peuple, les Aryas, Eraniens ou Iraniens, Ormuzd crée successivement seize autres « lieux et séjours excellents », dont « le premier et le meilleur » est « l'Airyana vaedja, d'excellente nature ».

Quant aux quinze autres lieux et séjours excellents, nous allons les faire connaître dans l'ordre de leurs créations successives, en les faisant suivre de leurs homonymes plus récents et plus ou moins altérés, après avoir rappelé, qu'alors comme aujourd'hui, dans la partie de l'Asie que nous allons parcourir, un même nom était souvent donné, à la province, à sa capitale et quelquefois même au fleuve qui la traversait, fait qui est loin d'être particulier à cette région du globe, qui a toujours été assez fréquent en France, et qu'on a retrouvé jusque chez les Peaux-Rouges d'Amérique.

2e lieu, Çugdha; c'est l'ancienne Sogdiane, située entre l'ancien Iaxarte ou Syr-Daria actuel et l'ancien Oxus ou Amou-Daria actuel.
3e lieu, Moûru, aujourd'hui Marv nu Merw, capitale de l'ancienne Margiane, sur l'ancien Margus, le Marghàb ou Merghâb actuel.
4e lieu, Bâkhdhi ou Bâghdhi, la Bactres des anciens, située au sud de l'Oxus, qui était la capitale de l'ancienne Bactriane et qui conserve encore le nom de Balkh.
5e lieu, Niçaya ou Niça, nom commun dans l'antiquité à plusieurs villes, toutes situées vers les limites de la Perse et du Turkestan actuel, ce qui rend indifférent pour notre sujet que la Niça en question ait été l'une ou l'autre de ces villes.
6e lieu, Haraeva (écrit Harayou par Eugène Burnouf), est la ville et la province actuelle de Hérat.
7e lieu, Vaekereta, dans lequel de Harlez reconnaît le moderne Kaboul.
8e lieu, Urva, inconnu.
9e lieu, Vehrkana (le pays des loups), la Varkana des inscriptions cunéiformes, est l'ancienne Hyrcanie.
10e lieu, Haraquaiti, ou l'ancienne Arachosie, dans le Sedjestan actuel.
11e lieu, Haetumat, qui est, suivant de Harlez, l'Etymander ou Erymander des anciens, région actuelle du Hilment, également dans le Sedjestan.
12e lieu, Ragha, qui serait la Ragaïa, située à l'est de la Parthie, suivant Kiepert et de Harlez, mais dans laquelle les gloses voient la rnédique Raï, la Rhagès de l'histoire de Tobie, située au sud-est de Téhéran.

13e lieu, Chakra, « probablement l'actuelle Charuch, dans le Khorassan », dit de Harlez.
14e lieu, Varena, où naquit Thraetaona, paraît être l'antique Kirmân, qui est située au sud du mont Derbend, à environ 500 kilomètres au sud-est d'Ispahan, d'après l'itinéraire de M. de Khanikof, dont on peut voir la carte à la page 273 du IVe volume du Tour du monde.
15e lieu, Hapta-Hendu, qui est le Sapta-Sindhu du Véda, le Pendjab actuel, arrosé par le cours supérieur de l'Indus et par ses affluents septentrionaux.

Arrêtons-nous un instant sur les indications fournies par ces divers noms de lieux, avant d'arriver à la discussion de la position du seizième.

Dès l'an 1833, l'identification de Çugdha, de Moûru, de Bâkhdhi, de Niçaya, de Harayou ou Haraeva, de Vehrkana, de Haraquaiti et de Hapta-Hendu, avec leurs homonymes plus récents, avait été faite par Eugène Burnouf, dans son Commentaire sur le Yaçna, aux pages XCII à CXX des Notes, et il est clair que lorsque Ormuzd dit à Zoroastre qu'il a créé successivement pour son peuple la Sogdiane, la Margiane, Bactres, Niçaya ou Nisée, le Hérat, l'Hyrcanie, l'Arachosie et le Pendjab, il ne s'agit pas là en réalité de la création successive de ces différents pays.


Cela signilie simplement que Ormuzd a donné successivement ces pays aux Iraniens, comme Jéhovah a donné la terre promise aux Hébreux, ou, pour parler le langage de l'histoire, que les Iraniens ont successivement conquis ces diverses contrées.
C'est la seule interprétation raisonnable qu'il soit permis de donner du premier fargard du Vendidad; et c'est pourquoi, malgré la dénégation de quelques auteurs, cette interprétation a été celle de la plupart des savants qui se sont occupés de la question, notamment de Rhode, de Lassen, de Bünsen, de A. Pictet, de F. Lenormant, etc.

Piétrement 1882

Dans les extraits du passage suivant, certaines déductions paraissent en contradiction les unes avec les autres.
Ces contradictions concernent l'interprétation de la recherche de l'Airyana vaedja et finalement aussi de l'identification de l'Airyana vaedja avec la première patrie des Aryas.

Vu l'ésotérisme des passages de l'Avesta et, de plus, l'état parcellaire des "débris" qui en ont été retrouvés, il n'est pas surprenant que l'interprétation de certains ait suscité des controverses.
Or dans ce que Piétrement retire (ci-dessous) de la traduction de de Harlez notons ceci:
recherche du seizième lieu
(qui manque à la liste ci-dessus des lieux de séjour excellents pour les Aryas)

reprenons la phrase concernant le début du premier fargard du Vendidad:
" Les renseignements suivants, donnés par le premier chapitre ou fargard du Vendidad, indiquent dans quelle direction il faut chercher la première patrie des Aryas, que ce livre nomme l'Airyana vaedja, l'Aryane de l'origine, ou « la terre productrice des Aryas, le berceau de la race aryaque », suivant l'expression de Harlez (Avesta, 1.1, p. 82).
Or, après avoir créé un lieu convenable, mais sans plus, pour les anaryens :
" Puis, en faveur de son peuple, les Aryas, Eraniens ou Iraniens, Ormuzd crée successivement seize autres « lieux et séjours excellents », dont « le premier et le meilleur » est « l'Airyana vaedja, d'excellente nature »

Le seizième lieu que nous cherchons serait donc ce "premier et meilleur" lieu. (premier pouvant s'entendre "hiérarchiquement").
Les doutes d'Eugène Burnouf n'étaient certainement pas vains....
on peut tout aussi bien comprendre que
pour les Aryas ce 16e lieu ait été soit leur première patrie, soit leur "terre promise" voire une espèce de paradis terretre....

en quelque sorte aussi bien "l'origine que la destination" dans la recherche de l'idéal...

Et, d'après l'analyse que nous présente Piétrement et les mentions du 2eme fargard du vendidad ce serait peut être tout à la fois....


   
   
   
   
   
   
 
   
   
   
   
   


"au delà" ?
nous comprenons
à tort ou à raison:
"au nord de "
-

ces auteurs auraient sans
doute eu raison, pour certains au moins

~La Rângha comme 16eme lieu pose un problème évident

"l'Arménien Moïse de Ghorène a dit dans sa Géographie que la région de la Rângha était cette partie de l'Assyrie qui confinait à l'Arménie, et l'étude des textes zends va lui donner raison."

combat Thraetaona/Dahâka dans la région de Babylone

Le Tigre

 


Or les identifications d'Eugène Burnouf suffisaient déjà pour montrer qu'à partir de la Sogdiane les conquérants iraniens se sont constamment avancés vers le sud, tout en poussant des pointes, tantôt à l'ouest, tantôt à l'est. On conçoit d'ailleurs que les Iraniens, comme tant d'autres peuples septentrionaux, aient été attirés dans cette direction par la beauté du climat et par la fertilité du sol des régions méridionales. L'un des débris de la littérature zende, traduit par de Harlez à la fin de son Avesta, l'Afrighan III, ne laisse d'ailleurs aucun doute sur le goût très prononcé des anciens Iraniens pour les climats du sud, car, aux versets 4-6, Zoroastre demande à Ormuzd quelle sera la récompense de l'homme qui récitera la prière à Rapithvan, génie qui préside à la région du midi, et il en reçoit cette réponse :

« Comme le vent [soufflant] de la région à laquelle préside Rapithvan, ô saint Zarathustra, fait prospérer et grandir, comble de biens et fait croître en joie le monde corporel tout entier, (ainsi) cet homme s'assure la possession d'autant de biens; autant est grande la récompense de cet homme qui par la prière, etc. ».

A la page 224 de son Commentaire sur le Yaçna, après une dissertation sur le sens étymologique du mot Rapithvan, Eugène Burnouf ajoute :

« Je ne vois pas clairement le rapport qui peut exister entre un radical signifiant se réjouir et le génie du midi. »

Ce rapport est clairement indiqué par ce passage de l'Afrighan III, qui montre que pour les Iraniens le midi était la région des terres fertiles, de l'abondance, de la prospérité et de la joie.


De l'ensemble de ces considérations, on peut déjà conclure que l'Airyana vaedja doit être cherchée
au delà de la Sogdiane, c'est-à-dire au delà de l'Iaxarte.

-

L'emplacement assigné par certains auteurs au 16e lieu, créé par Ormuzd, pourrait seul être invoqué contre notre croyance à la marche constante vers le sud de la conquête iranienne; mais nous allons montrer, par les textes mêmes de l'Avesta, que ces auteurs se sont trompés en déterminant comme ils l'ont fait la position de ce lieu.

-

Ce 16e lieu est la région de la Rângha, dans laquelle Spiegel a cru reconnaître l'Iaxarte, de Harlez l'Oxus, et Windischmann l'Indus.
Mais, ainsi qu'Anquetil du Perron l'a fait observer dans sa traduction du Zend-Avesta, l'Arménien Moïse de Ghorène a dit dans sa Géographie que la région de la Rângha était cette partie de l'Assyrie qui confinait à l'Arménie, et l'étude des textes zends va lui donner raison.

Parmi les nombreux renseignements que l'Avesta donne sur la Rângha, notons d'abord celui du yesht XX, verset 4, où Zoroastre dit au roi Vistaçpa:

« Domine sur la Rângha, si large à traverser, comme Vafrô navaza, »

ce qui indique que la Rângha était le plus considérable ou tout au moins l'un des plus considérables des fleuves connus des Iraniens contemporains de Zoroastre.

Dans le yesht V, 60-67, Vafrô navaza, averti d'un péril par la voix de son souverain Thraetaona, parvient à regagner ses domaines, situés sur les rives de la Rângha, où il offre un sacrifice à la déesse Ardwiçura anahita, [....] . Harlez en conclut,[....], que cette circonstance vient à l'appui de sa croyance à l'identité de la Rângha et de l'Oxus, [.....]
Mais c'est une erreur manifeste, puisqu'ici Vafrô navaza est averti du danger par Thraetaona, et que, d'après le même yesht V, versets 28-31 et 32-35, Thraetaona venait au contraire de combattre Dahâka, dans la région de Babylone. [....] Le yesht V porte donc déjà à croire que la Rângha traversait une province iranienne limitrophe de l'Assyrie; et cette opinion est confirmée par un texte du yesht X, dont notre ami, M. Léon Rodet, nous a signalé toute l'importance pour la solution de la question qui nous occupe.


Voulant indiquer que Mithra embrasse toute la terre, l'auteur du yesht X nomme, dans le verset 104, d'abord l'orient, puis l'occident, puis la Rângha, puis les extrémités de la terre.

Or, pour les iraniens avestiques comme pour les Hindous védiques, qui les uns et les autres se tournaient vers l'orient pour prier, l'orient était le devant, l'occident le derrière, le sud la droite et le nord la gauche. Comme le devant était plus noble que le derrière, et que la droite était plus noble que la gauche, les anciens Hindous nommaient toujours les quatre points cardinaux dans l'ordre suivant : l'orient, l'occident, le sud et le nord; [....] à notre connaissance, le seul exemple d'énumération des quatre points cardinaux fourni par la littérature zende.[....]
les textes pehlvis montrent la persistance de cette habitude chez les Iraniens des temps postérieurs.
Ainsi, dans le Boundehesch, chap. II et chap. XI, les quatre régions de la terre correspondant aux quatre points cardinaux sont nommées dans l'ordre suivant : l'orientale, l'occidentale, la méridionale, la septentrionale; et vers la fin du chap. V du même ouvrage elles sont énumérées ainsi : l'orientale, la méridionale, l'occidentale et la septentrionale[....] l'on peut conclure avec certitude que, dans le yesht X, les extrémités de la terre désignent l'extrême nord, et que la Rângha est placée par ce yesht à l'extrême limite méridionale des pays connus des Iraniens avestiques, ou tout au moins aux frontières méridionales de leur empire.

La Rângha ne peut donc être que l'Indus, le Tigre ou l'Euphrate; et l'histoire de Vafrô navaza porte plutôt à croire que c'était le Tigre, sur le cours supérieur duquel aurait été située sa province ou satrapie, dans laquelle il se serait réfugié après un échec essuyé sous les yeux de son suzerain Thraetaona, en combattant le Babylonien Dahàka.

-

[....] Pourushaçpa, père de Zoroastre, vit dans l'Airyana vaedja et y voit naître son fils (Yaçna, IX, 41-44) ; et Zoroastre, contemporain de Vistaçpa, le plus récent des rois iraniens nommés dans l'Avesta, (note: d'après le Boundehesch, il aurait vécu vers - 800), sacrifie encore dans l'Airyana vaedja (yesht V, (l03-106), ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que l'Airyana vaedja de Vistaçpa avait conservé les dimensions de l'Airyana vaedja des Aryas primitifs, pas plus que l'empire romain des Césars n'avait conservé les dimensions du royaume de Romulus et des Tarquins.

Piétrement 1882

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[....] les renseignernents fournis par les textes de l'Avesta, confirmés et complétés par les données de la philologie comparée, montrent que la
première patrie des Aryas était un pays accidenté, une région alpestre entrecoupée de nombreuses vallées, riche en mines métallifères, en torrents et en rivières, en forêts et en pâturages, possédant une flore et une faune très variées, flore et faune indiquant le climat qui est dit tempéré, parce qu'on y souffre moins longtemps de la chaleur que sous les tropiques, et du froid que dans les régions circumpolaires.
[....]
Le passage suivant, emprunté au XXVe chapitre du Boundehesch, ouvrage traduit du pehlvi par Anquetil du Perron, fournit aussi un précieux renseignement :

« [Ormuzd] parlant dans la Loi de l'œuvre de la Loi [dit] : J'ai fait les productions du monde en trois cens soixante-cinq jours..... Il faut compter premièrement le jour, et ensuite la nuit, parce que le jour a été d'abord : la nuit est venue ensuite......
Le [plus long] jour d'été est égal aux deux [plus] courts jours d'hiver; la [plus longue] nuit d'hiver est égale aux deux [plus] courtes nuits d'été. [Le jour] d'été est de douze hesars et la nuit de six hesars; la nuit d'hiver est de douze hesars et le jour de six. ». Boundehesch, chap. XXV, à la page 400, de la traduction d'Anquetil du Perron.

[....]

Volney a le premier signalé l'importance de ce document dans le chapitre XVII de ses Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, où il dit à la page 362 :

« Un pareil ordre de choses n'a lieu que sous le 49° degré 20 minutes de latitude, où le plus long jour de l'année est de 16 heures 10 minutes et le plus court de 8 heures 5 minutes. Or cette latitude est d'environ 12 degrés plus nord que les villes de Bactre ou Balkh et Ourmia, où l'histoire place le théâtre des actions de Zoroastre. Cette latitude sort infiniment au delà des frontières de l'empire persan, à quelque époque qu'on le prenne.
Elle tombe dans la Scythie, soit au nord du lac d'Aral et de la mer Caspienne, soit aux sources de l'Irtisch, de l'Ob, du Jenisei et de la rivière Selinga ; elle se trouve dans le pays des anciens grands Scythes (ou Massagètes),[....]

Quoique la compilation du Boundehesh ne paraisse pas remonter au delà du règne des Sassanides, le fond du passage précité n'en est pas moins très ancien, puisqu'il est donné par l'auteur comme un discours d'Ormuzd parlant dans l'Écriture sainte, qui est l'Avesta. [.......]
Nous sommes donc bien en présence d'une très ancienne tradition iranienne, [.......]


Aux pages 110 et 113 du tome Ier des Origines indo-européennes, Pictet a montré, par des inductions tirées de la philologie comparée, non seulement que les Aryas primitifs ont connu une mer, mais aussi que cette mer était située à l'ouest de leur pays.

Ce fait est si important, et d'autre part on a quelquefois tellement abusé de la philologie comparée, que nous rappellerons brièvement les considérations sur lesquelles Pictet s'est appuyé.

Presque tous les dialectes aryens européens anciens et modernes, [....], possèdent un nom commun, analogue a notre mot mer, pour désigner la mer. On peut déjà en conclure qu'un accord [....] doit remonter à l'origine de toutes ces langues, c'est-à-dire à une époque antérieure aux migrations aryennes. [....]


Enfin, le Hara ou Hara barezaiti, [....] était situé à l'est de cette contrée, puisqu'on lit dans le
yesht X, 12-13 :

« Nous honorons Mithra..... le premier Yazata céleste qui s'avance au-dessus du Hara, marchant devant le soleil immortel, aux coursiers rapides; qui, le premier paré de l'éclat de l'or, atteint les sommets brillants d'où il embrasse, favorisant les êtres, tout le sol aryaque. »

[....]. La mer près de laquelle les Aryas primitifs ont vécu ne peut être en effet que le lac Balkach, [....] qui n'est qu'à environ cinq cents kilomètres au nord-est du Syr-Daria ou ancien Iaxarte, pris à la hauteur de la ville nommée Turkestan, et située à quelques lieues de la rive droite de ce fleuve, vers le tiers septentrional de son cours. [....]

Ce pays est bien connu depuis que les Russes en ont fait la conquête (1846-1855), et il satisfait à toutes les conditions exigées pour être déclaré la patrie primitive des Aryas.

II est en effet situé au delà et, à proximité de la Sogdiane au nord-est du Syr-Daria, comme le demandent les renseignements fournis par le premier chapitre du Vendidad.


Cette position [....] satisfait également
à la donnée philologique qui exige la proximité d'une mer située à l'occident, car le lac Balkach est une véritable mer intérieure, sans issue, où se rendent une foule de rivières, mais d'où il n'en sort aucune.
[....] on admettra bien que, tout en ayant ce lac à l'occident de leur patrie, les Aryas ont pu avoir leur frontière septentrionale à deux degrés plus au nord, vers le 49" degré de latitude, ce qui leur a permis de connaître des jours d'été deux fois aussi longs que les plus courts jours d'hiver, comme l'indique le Boundehesch.

L'Alatau,[....] renferme des mines d'or, d'argent, de plomb, de cuivre, de fer, de soufre et de sel ; ses forêts fournissent des bois de construction ; ses nombreuses vallées et les plaines situées à sa base sont d'ailleurs très fertiles, riches en pâturages; enfin la faune et la flore de ce pays sont celles que les Aryas ont connues avant de commencer leurs grandes migrations, ce qui achève de satisfaire à toutes les conditions exigées [....]


Sans entrer dans des détails sur sa flore et sa faune, nous ferons seulement observer que les Aryas ayant connu le tigre, les savants auraient hésité, il y a une cinquantaine d'années, à admettre que ce peuple est originaire des pentes occidentales de l'Alatau; mais les renseignements suivants, fournis par un témoin oculaire, sont venus confirmer ceux de la philologie comparée :

"Les monts Alatau, élevant leur cimes bien au-delà de la zone des neiges éternelles, et plongeant leurs racines dans des plaines basses où il n'est pas rare de voir, en été, le thermomètre monter à 50 degrés, ont une faune des plus variées. A leur base, le tigre, le vrai tigre, prélève de nombreuses contributions sur les troupeaux des nomades ; dans les anfractuosités de leurs vallées élevées, l'ours du nord épie ces mêmes troupeaux, lors de leurs migrations, et, à leur défaut, chasse l'argali et le cerf. Dans mes courses à travers l'Asie centrale, j'ai croisé fréquemment la piste de l'un et de l'autre de ces grands carnassiers.
Leurs rugissements ont souvent troublé le repos de mes haltes de nuit. Plus d'une fois j'ai vu les feux de mon bivac se réfléchir dans leurs prunelles fixes et sanglantes. Enfin, il arriva un jour qu'un de mes guides, assailli à l'improviste par un tigre, ne dut son salut qu'à l'abandon qu'il fit du cheval qu'il montait pour s'enfuir à toute bride sur son cheval de main ". Atkinson, Voyage, etc., dans le Tour du monde, t. VII, p. 376.

Les monts Alatau sont donc le Hara barezaiti, [....] sur le sommet duquel Yima sacrifie (yesht V, 24-27) pour obtenir la souveraine puissance et la victoire sur les populations anaryennes.
On reconnaît également la mer Vourukasha, située au sommet du Hara barezaiti, et répandant ses eaux sur la terre, dans les glaciers éternels de l'Alatau.
Le récit mythique du yesht VIII, relatif à la victoire de Tistrya, génie de l'Orient, remportée près de la mer Vourukasha, sur Apaosha, démon de la sécheresse et de la stérilité, est d'ailleurs une allusion très claire à l'origine orientale des rivières qui étaient alimentées par les glaciers éternels de l'Alatau [....]


Enfin, le nom de l'Ariané ou Arie des auteurs grecs et latins, ancienne province de la Perse située sur la rive droite de l'Indus, a fait supposer à certains auteurs que c'était la première patrie des Aryas ; mais, après avoir indiqué les limites de cette province, Strabon ajoute, XV, 11, 8 :

« Du reste, ce nom d'Ariané s'étend encore par delà les limites indiquées ci-dessus et s'applique non seulement à une partie de la Perse et de la Médie, mais à une partie aussi de la Bactriane septentrionale et de la Sogdiane; »

ce qui suffirait pour montrer qu'on n'est pas plus autorisé à faire venir les Aryas des bords de l'Indus qu'on ne le serait à donner notre province de Normandie comme la première patrie des Normands, ou à donner la Galatie d'Asie Mineure comme le berceau des Gaulois.

Piétrement 1882

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