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HAUTE ANTIQUITE

Aryas primitifs

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Aryas et aryens
L'Avesta et les traditions persanes

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Aryas et peuples aryens (chapIII,§2)

On a quelquefois donné, par opposition aux expressions race sémitique et race mongolique, les noms de race indo-germanique, de race indo-européenne, puis de race aryenne à l'ensemble des peuples ci-dessus énumérés par Max Müller, parce que le peuple primitif dont ils tiennent leurs langues et leur civilisation se donnait à lui-même le nom d'Aryas, comme l'ont prouvé l'étude comparée de ces langues et la lecture de l'Avesta, du Véda et des inscriptions cunéiformes.

Les preuves de cette dernière assertion sont très nombreuses dans le Véda et dans l'Avesta ; elles sont assez connues pour qu'il soit inutile de s'y arrêter; aussi nous bornerons-nous à rappeler que l'inscription funéraire trilingue de Darius, à Nakch-i-Roustam, commence ainsi dans le texte médique dont
M. Oppert a donné la transcription et la traduction :

"Un grand dieu est Ormazd, qui a créé cette terre, qui a créé ce ciel, qui a créé l'homme, qui a donné à l'homme le Bon Principe, qui a fait Darius roi, roi de beaucoup de rois, législateur de beaucoup de législateurs.
"Je suis Darius, grand roi, roi des rois, roi des pays où se parlent toutes les langues, roi de cette terre étendue, vaste, fils du père Hystaspe, Achéménide, Perse, fils de Perse, Arien, de semence arienne.»
J. Oppert, Le peuple et la langue des Mèdes, p. 204.

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C'est à tort qu'on a donné le nom de race à l'ensemble des peuples de langues aryennes, car la classification des races est tout-à-fait indépendante de celle des langues ;
et il existe de trop grandes différences dans les caractères physiques des divers groupes d'hommes de langues aryennes, notamment des Tudesques ou Germains d'une part, et des plus purs représentants des Celtes (Savoyards, Auvergnats et Bas-Bretons) d'autre part, pour qu'on puisse en faire une seule race.

Les Aryas n'ont donc probablement été que des ancêtres purement intellectuels pour quelques-uns de ces peuples, et cette question sera examinée plus loin.


En tout cas, au lieu de l'expression race aryenne, nous emploierons celle de peuples aryens, qui est tout aussi courte, plus exacte, et qui signifiera uniquement que ces peuples ont conservé ou accepté la langue et la civilisation des Aryas.

Piétrement 1882

 

L'Avesta, la religion aryenne et les traditions persanes. (§3)

Le fait si important du complet isolement originel des quatre peuples chez lesquels sont nées les quatre principales civilisations du globe est en parfaite concordance avec l'histoire des chevaux domestiques ; car elle va montrer que les deux peuples primitifs chez lesquels sont nées les civilisations aryenne et mongolique ont domestiqué chacun une des deux races chevalines asiatiques, et que les peuples sémitiques, originairement dépourvus de chevaux, sont redevables de ces deux races chevalines aux peuples aryens et mongoliques, auxquels ils ont donné en échange la race asine orientale, qu'ils tenaient des Nubiens ou Proto-Egyptiens.

Nous commencerons par l'histoire du cheval aryen ; et, pour procéder avec ordre, nous déterminerons d'abord la position de sa première patrie, c'est-à-dire celle des Aryas, après avoir donné de brefs renseignements sur l'Avesta, sur la religion aryenne et sur les traditions persanes relatives aux époques antérieures à celle de Zoroastre : ce qui nous dispensera de surcharger de notes le présent chapitre et une partie du suivant.

Le Zend-Avesta ou plus simplement l'Avesta est le livre sacré, la bible des anciens Eraniens, Iraniens, ou Proto-Perses.

Il est écrit en langue zende et se composait à l'origine de 21 livres, nosks ou naskas, que la tradition parsie attribue à Zoroastre, et que l'on peut tout au moins attribuer à ses premiers disciples.
On s'accorde du reste à le faire rédiger à Bactres ou à proximité de cette ville, qui était la capitale du roi Vistaçpa, à la cour duquel Zoroastre prêcha sa doctrine.
La plupart des naskas ont été perdus par suite de la persécution religieuse consécutive a la conquête de la Perse par Alexandre; et les débris encore subsistants n'ont été rassemblés que dans la première moitié du troisième siècle de notre ère, sous le règne d'Ardeschir, le fondateur de la dynastie persane des Sassanides.
L'Avesta ne se compose donc plus aujourd'hui que de trois livres, qui sont :
le Vendidad, livre des traditions et des lois de purification, rédigé sous la forme de conversations entre Zarathustra ou Zoroastre et le dieu Ahura-Mazda ou Ormuzd qui l'instruit;
le Vispered, recueil d'invocations et de prières en l'honneur des principales divinités du panthéon mazdéen ;
et le Yaçna, livre de la liturgie et des sacrifices.

Ces deux derniers livres se composent de morceaux détachés, en partie fragmentaires. Quant au Vendidad, il paraît être la réunion en un seul corps des débris épars de plusieurs livres de l'Avesta primitif.
Il règne un grand désordre à l'intérieur de ses chapitres :

" on y trouve, en effet, tantôt des lacunes considérables, tantôt des interpolations qui brisent le sens, et même parfois une interversion complète des idées, »

comme le dit le chanoine de Harlez, le traducteur de l'Avesta (t. I, p. 74).

La littérature zende comprend en outre le Khorda Avesta ou livre des Yeshts ou Yashts, hymnes religieux dont chacun est affecté à une divinité particulière ;
ils étaient très nombreux autrefois, puisque chaque divinité avait son Yesht ; mais il n'en reste plus que vingt-deux.

La composition de ces Yeshts est d'ailleurs antérieure à l'époque de Zoroastre, mais ils ont subi depuis des remaniements, devenus nécessaires pour les mettre en rapport avec le nouveau culte mazdéen, dans les cérémonies duquel ils continuèrent d'être chantés.

La perte de la plupart des livres de l'Avesta est d'autant plus regrettable pour l'historien que les Parsis semblent avoir sauvé de préférence les parties de leur Bible qui traitent de sujets religieux;

ce qui en reste fournit néanmoins, sur la première patrie des Aryas et sur les premières migrations du rameau iranien, quelques précieux documents qu'on chercherait vainement ailleurs.

Piétrement 1882

 


L'Avesta est l'un des livres où se reconnaît le mieux le naturalisme primitif de la religion aryenne, qui consistait uniquement, à l'origine, dans le culte rendu aux astres, aux éléments et aux phénomènes naturels ( Sur la religion des Aryas primitifs, voyez
Girard de Rialle, Les peuples de l'Asie et de l'Europe, . 121-130.) : divinités les unes protectrices les autres ennemies, qui avaient toutefois été déjà personnifiées, anthropomorphisées avant l'époque de Zoroastre.

La mission de ce réformateur eut surtout pour but et pour résultat d'abaisser tous les génies bons et mauvais du panthéon aryen pour en faire de simples ministres, les premiers d'Ahura Mazda (l'être vivifiant), les autres d'Angro-Mainyus ou Ahriman (l'esprit meurtrier) qui correspondent assez exactement au Dieu et au diable des chrétiens.

Beaucoup de divinités sont communes à l'Avesta et au Véda, c'est-à-dire aux Iraniens et aux Aryo-Hindous.

L'universalité des génies protecteurs est souvent désignée dans l'Avesta par le mot Yazatas, dans le Véda par le mot Dévas ; et ce dernier mot est identique à notre mot Dieu et aux mots qui lui correspondent dans plusieurs langues aryennes anciennes ou modernes de l'Europe.
Mais le mot Dévas a pris le sens de démons chez les Iraniens, après la réforme zoroastrienne.

Les bons génies de l'Avesta habitent, avec leur chef Ormuzd le mont Hara ou Hara-barezaiti, situé à l'orient, et au sommet duquel est placée la vaste mer Vouru-kasha, d'où sortent tous les fleuves de la terre : image sous laquelle on reconnaît facilement l'ensemble des glaciers répandus sur le massif orographique de l'Asie centrale et qui devait à l'origine désigner uniquement les glaciers de l'Alatau, comme on le verra plus loin.

Le mythologique arbre Gaokerena plonge ses racines au milieu de cette mer, dont les rivages sont surmontés par le pic Hukairya, pointe extrême du Hara-barezaiti.

Ceux des bons génies qu'on rencontrera dans nos citations de l'Avesta sont les suivants :

Hware-kshaêta ou le Soleil.
Mithra, personnification de l'éther lumineux, de la lumière considérée en elle-même, le plus rapide des dieux, qui précédait Ushanh (l'Aurore) dans sa course
Çraosha, compagnon de Mithra, participe à sa nature et à ses attributs, semble personnifier spécialement la foudre.
Tistrya, l'astre Sirius personnifié, gardien de la région orientale, donne la liberté aux eaux captives en combattant le génie de la sécheresse.
Rapithvan, le génie de la région du sud.
Vayou, le génie du vent.
Armaïta ou Çpenta Armaïta (l'auguste sagesse), qui est la Terre, la mère du genre humain.
Ardwiçura Anahita, souvent désignée par un seul de ces deux noms, est la source divine, le génie des eaux qui habite le pic Hukairya, d'où elle répand les eaux fertilisantes sur toute la terre.
Ashi vanuhi, la sainteté, personnifiée.
Druaçpa, déesse protectrice des animaux domestiques.
Verethraghna, génie de la victoire, paraît avoir été d'abord la personnification de l'éclair.
Amératàt, génie de l'immortalité, avait d'abord été le génie des plantes.
Haurvatàt, l'esprit de l'univers, avait d'abord été le génie des eaux.
Haoma ou Hôma, identique au Sôma védique, est tantôt l'asclépias acida, tantôt la liqueur fermentée qu'on extrait de cette plante, tantôt le sacrifice dans lequel on offre cette liqueur, le tout divinisé.
Les Fravashis ou Ferouers sont des génies tutélaires ou espèces d'anges gardiens ; chaque être doué d'intelligence avait son féroue

Quant aux démons avestiques compagnons d'Ahriman, les seuls que nous aurons à citer sont :

Aeshma, démon du meurtre et du brigandage.
Apaosha, démon de la sécheresse et de la stérilité.
Azhi (le serpent), qui rôde la nuit autour des habitations pour tuer les humains et enlever le feu.
Enfin les Yâtus, démons enchanteurs et homicides, et les Pairikas, druges ou démons femelles puissants et redoutables, sont souvent les uns et les autres associés dans les malédictions mazdéennes avec les Kavis et, les Karapans, qui sont les prêtres des infidèles anaryens.

Si les traditions persanes ne sont pas toujours complètement d'accord sur les faits des temps héroïques antérieurs à la réforme zoroastrienne, toutes s'accordent du moins à remplir ces temps par le règne de deux seules dynasties iraniennes, celle des Paradhâtas ou Peshdadiens et celle des Kavas ou Kayaniens.

Piétrement 1882

 

En général, Gayô-meretha ou Kayoumors est seulement regardé comme le premier homme crée par Ormuzd (clé yesht XIII, 87), bien que Firdousi en fasse le premier roi iranien dans son Shah nameh ou Livre des Rois.

Le premier roi peshdadien serait donc Haoshyanha ou Hosheng, donné par les traditions comme un arrière-petit-fils de Kayoumors.
Le deuxième serait Takhma urupa ou Tahmouras, regardé comme le frère aîné de Yima et descendant de Hosheng, par son père Vivanghat.
Le troisième serait Yima, qui fut ensuite appelé Djemschid ou Djemsched, parce que son nom (en pehlvi Yam ou Djam) est habituellement suivi de l'épithète Kshaêta (brillant) ; de l'ensemble Yima-Kshaêta, les Parsis ont fait Djemsched.

Après Yima, les traditions placent un usurpateur étranger, Dahàka ou Dzohak.
Ce dernier fut dépossédé par le quatrième peshdadien légitime, le fils d'Athwya, le Thraetaona de l'Avesta, qui fut plus tard appelé Afridoun et Féridoun, et auquel l'Avesta donne Vafrô navaza pour compagnon d'armes.

Le cinquième est Manuscithra ou Manuchir, qui eut à repousser les invasions du roi touranien Franracyana ou Afrasiab; et la première dynastie finit avec son successeur Uzava ou Zav, qui rétablit la paix de l'Iran par un traité avec Franracyana.

Le nom de ce dernier fut porté par plusieurs rois touraniens, car il reparaît dans les guerres de la deuxième dynastie.
Les règnes de Manuchir et de Zav furent du reste signalés par les exploits des deux fils du Thrita inventeur de la médecine, les deux héros Urvakshaya et Kereçaçpa, dont la tradition fait deux princes du Sedjestan, issus de la race peshdadienne.

Les deux premiers rois kayaniens sont le Kava Kavata ou Kai Kobad et son fils Uça.
Le troisième Kava est, Huçrava (l'illustre), petit-fils de Nara par son père et de Uça par sa mère. Il réunit toutes les contrées iraniennes en un seul royaume, avec l'aide de son lieutenant Tuça, prince kayanide.
Après la mort de Huçrava, le trône de l'Iran est occupé par Aurvataçpa ou Lohraçp, appartenant à une branche spéciale de Kayanides, celle des Naotarides.

C'est à la cour de Vistaçpa ou Gustasp, fils de Lohraçp, que fut d'abord prêchée la réforme de Zoroastre, fils de Pourushaçpa et petit-fils de Haecataçpa.
Vistaçpa eut à combattre le roi des Qyaoniens, Ardjataçpa, dont il triompha avec l'aide de son frère Açpâyôdha, de ses lieutenants Ashavazdao, Trita et Zairivairi, et de son ministre Jâmâçpa, issu de la noble race des Hwovides.
Tous les rois et tous les héros précités figurent dans l'Avesta, qui nous fournira bientôt des documents intéressants sur les actes de quelques-uns d'entre eux; mais, ainsi que
de Harlez le fait observer à la page 7 de l'introduction au tome III de son Avesta,

« avec le règne de Vistaçpa et la réforme zoroastrienne se terminent tous les renseignements que les textes zends nous donnent sur les antiquités iraniennes. »

Nous nous servirons de la traduction de Harlez pour les documents de l'Avesta que nous aurons soit à analyser, soit à citer textuellement; dans ce dernier cas, nous corrigerons le texte du traducteur, chaque fois que l'occasion s'en présentera, d'après les errata placés à la fin des volumes; et celles des notes que nous lui emprunterons seront toujours suivies du mot (Harlez) entre parenthèses.

Piétrement 1882

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