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HAUTE ANTIQUITE

cheval aryen et peuples aryens d'orient

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"dans l'Aryane primitive et en Perse"

vie quotidienne et utilisation du cheval
chez les Aryas

....

plan2

ant\cvxaryasperses
.

N.B.:

le titre complet du chapitre
de Piétrement a été conservé mais seule la partie qui traite de l'Aryane primitive est rapportée ici.

En effet: la Perse ne commence à proprement parler qu'avec les Achéménides. Il n'en sera donc question que dans le chapitre ANTIQUITE..

Les chevaux aryens dans l'Aryane primitive et en Perse, (chapIV,§2p196)

Le deuxième chapitre du Vendidad nous a montré les Aryas en possession de divers animaux domestiques dès l'époque de leur séjour dans leur première patrie, et les Iraniens emmenant ces animaux avec eux lors de leurs premières conquêtes, effectuées sous la direction de leur roi légendaire Yima .

On a vu [...] que
de Harlez désigne ces animaux par les mots « troupeaux, bêtes de trait, chiens et oiseaux ».
Le mot qu'il rend par "bêtes de trait" est le zend
çtaora, sur lequel Eugène Burnouf a déjà dit à la page LXIX des notes de son Commentaire sur le Yaçna :

« Le mot zend çtaora se retrouve dans le sanscrit sthaûrin, cheval qui porte des fardeaux. Dans le Zend-Avesta, çtaora désigne les bêtes de somme par opposition à paçu, les animaux en général et les bestiaux en particulier. »

[....] le sens étymologique de çtaora indique qu'à l'origine ce mot désignait les animaux gros, massifs, solides, de grande taille. Comme ce sont ces sortes d'animaux qui, en raison de leur force, ont été utilisées pour le travail, il est clair que, avant d'être restreint dans les dialectes iraniens modernes au sens spécial de cheval, le mot çtaora a d'abord désigné l'ensemble des bêtes de travail, des moteurs animés, c'est-à-dire tous les animaux de selle, de trait et de bât. [....]
C'est évidemment avec cette acception générale de moteurs animés que le mot çtaora est employé dans le IIe chapitre du Vendidad, puisqu'il y est opposé à paçu, c'est-à-dire au bétail proprement dit, aux animaux de rente, utilisés uniquement pour les produits qu'ils fournissent, toisons, lait, viande, graisse, etc. [....].

Dans le Vendidad,

chap. V, verset 152, : le lait de jument pur et frais, est l'un des aliments prescrits à la femme récemment accouchée d'un enfant mort-né.

VI, 54-55. Zoroastre
dit à Ormuzd. :
" Créateur des mondes, si des mazdéens en marchant, en naviguant, en allant à cheval ou en char, rencontrent un cadavre flottant sur l'eau, que doivent-ils faire, eux les disciples de la loi mazdéenne? »
VII, 105-114. Ormuzd
dit à Zoroastre :
« Que le médecin traite un prêtre sans demander d'autre salaire que les prières liturgiques de bénédiction (105)... un chef de district pour un quadrige (109). S'il soigne en premier lieu la femme d'un chef de nmâna, (Nmâna, maison, famille.), son salaire sera de la valeur d'une ânesse (110). Qu'il traite l'épouse d'un chef de village pour la valeur d'une vache (111), l'épouse d'un chef de clan pour la valeur d'une jument (112), l'épouse d'un chef de district pour la valeur d'une chamelle (113); un enfant d'un village pour une bête de trait de grande espèce (114). »
VIII, 229-232. Zoroastre dit :
" Créateur des êtres visibles, si des mazdéens marchant ou naviguant, allant à cheval ou en char,.....
IX, 146-150.
" On doit purifier un prêtre pour les bénédictions liturgiques, un chef de district pour un chameau de première valeur, un chef de clan pour un cheval de première valeur, un chef de village pour un taureau de première qualité, un chef de nmàna pour une vache de trois ans. »

XIV, 50-53.

L'une des punitions du meurtrier d'un castor consiste à donner autant d'argent qu'en vaut un cheval mâle et autant d'or qu'en vaut un chameau mâle.
XV, 76-83 Il est ordonné par Ormuzd, à tout constructeur, c'est-à-dire propriétaire d'écurie, littéralement lieu à chevaux, de nourrir toute chienne qui vient y mettre bas.
XVIII, 29-31, Ormuzd dit à Zoroastre :
« Celui qui donne à un seul de ces impies pervers et impurs une part de hôma préparé pour le sacrifice, ou de la viande consacrée, commet un crime aussi grand que s'il conduisait une armée de 500 cavaliers. D. Harlez dit en note : « Littéralement de 1000 chevaux. Il s'agit ici de chars, chacun d'eux avait 2 chevaux. » Nous reviendrons plus loin sur cette assertion contre un bourg de mazdéens, que s'il tuait les hommes et emmenait les troupeaux captifs.»

Dans le Yaçna,

IX, 71.
« Hôrna donne aux guerriers qui pressent leurs chevaux sous le joug, la force et la vigueur. »
XI, 1-2.
« II est trois êtres essentiellement purs, nés pour bénir et qui cependant maudissent (parfois) : la vache, le cheval et Hôma.
« 7-10. Le cheval maudit celui qui le conduit (De Harlez dit en note : « Et le nourrit mal, comme le prouve ce qui suit) : : Puisses-tu ne jamais atteler, ne jamais monter, ne conduire jamais des coursiers rapides, ô toi qui ne cherches pas (à me donner) de la force (pour que je sois vigoureux) .... »
XLIII, 18 Zoroastre :
« Comment, par la sainteté, mériterai-je cette récompense : dix chevaux mâles et un chameau, ô Mazda, ...
LVI, 10.
« Protège-nous, ô Çraosha, saint et majestueux, ............ donne la force à nos chevaux, la robusticité à nos corps.... »

Dans les Yeshts

V, 7. 20-23
" Honore Ardwiçura, à laquelle Haoshyanha le Paradhâta offrit en sacrifice, au pied du Hara, cent chevaux mâles, mille bœufs, dix mille bêtes de petit bétail.
V, 7. 24-27
" Honore Ardwiçura à laquelle le brillant Yima, le pasteur des hommes justes, offrit sur le haut du Hukairya
100 chevaux mâles, 1000 bœufs, 10 000 bêtes de petit bétail. . »
V, de pareils sacrifices de 100 chevaux, 1000 bœufs et 10 000 bêtes de petit bétail sont faits :
aux versets 28-31, par Dahâka. Dans la région de Babylone, aux versets 32-35, par Thraetaona; aux versets 36-39, par Kereçaçpa; aux versets 40-43, par « le Touranien Franracyana » ; aux versets 48-51, par Huçrava se préparant à combattre Franracyana, qui arrive « monté sur ses chevaux » (açpaeshu), c'est-à-dire à la tête de ses cavaliers; aux versets 52-55, par Tuça; aux versets 56-59, par les Aurva Hunus; aux versets 68-70, par Jamaçpa; aux versets 71-74, par Ashavazdào et Trita; aux versets 107-110 par Vistaçpa; aux versets 111-114, par Zairivairi, "qui combat à cheval" (açpayaodho) ; et, aux versets 115-118, par Ardjataçpa.

A la suite de ces divers sacrifices, les demandes des chefs iraniens sont naturellement accordées, tandis que celles de leurs ennemis,[....] ne sont pas exaucées.

En outre, l'auteur du Yesht V, qui est un chef iranien, dit aux versets 130-131 :
« Je te demande donc ici, ô bonne et vivifiante Ardwiçura, de pouvoir, en répandant des bénédictions,...donner la sécurité aux vastes royaumes..., riches en chevaux,.....
IX Haoshyanha, Yima, Thraetaona, Huçrava, et Vistaçpa sacrifient chacun 100 chevaux, 1000 bœufs, 10 000 bêtes de petit bétail à la déesse Druaçpa, dont le nom signifie aux chevaux sains. C'est une répétition souvent textuelle des versets du Yesht V relatifs à ces rois.
X, 3. « Mithra qui s'étend au loin sur les campagnes donne des chevaux rapides à ceux qui ne le fraudent point.....
X, 10-11 Nous honorons Mithra ......, auquel les guerriers en char sacrifient sur le dos de leurs chevaux (Nous donnerons plus loin le vrai sens de cette singulière phrase)
17-21 Nous honorons Mithra..... Des mithradrujes les plus légers, courant ne peuvent atteindre, chevauchant n'avancent point, allant en char ne peuvent diriger leur course. Il retourne en arrière, le trait que lance l'ennemi de Mithra..... »
XV, 10-13 « A lui (Vayou) sacrifia Takhma-urupa tout armé, sur un trône d'or..... Il lui demanda cette faveur :..... que je monte dompté, Angro-Mainyus, transformé en cheval, (et le conduise) pendant trente ans, aux deux extrémités de la terre. Vayou...lui accorda cette faveur. »
XVII, 7.
« Ces hommes sont pleins de puissance, ils ont une table abondante..... ils font voler l'écume de leurs chevaux et retentir les roues de leurs chars, ô Ashi...... ces hommes que tu favorises. »
XVIII, 1.
« Ahura Mazda dit au saint Zarathustra : J'ai créé, ô saint Zarathustra, la majesté aryaque, .... Elle écrase toutes les contrées anaryennes.... Elle devient riche de mille chevaux, de mille troupeaux; bien plus, d'une descendance proche. »
XIX, 29.
« Il(Takhma-urupa) monta Angro-Mainyus soumis à ses volontés, transformé en cheval, pendant trente ans, (le conduisant) aux deux extrémités de la terre."
XX, 4, et XXI, 2. Zoroastre dit à Vistaçpa :

« Sois riche en chevaux comme Pourushaçpa.
XXI, 47. Vistaçpa dit à Zoroastre :
« Là sont des chevaux portant bien (leur cavalier), là des chars marchant bien. C'est là la bonne constitution de la puissance, ô Zarathusta."

[....] noms d'hommes dans la composition desquels entre le mot açpa : cheval [....] et leur signification étymologique :

Açpa-yôdha, combattant à cheval.
Ardjat-açpa, qui gagne des chevaux.
Aurvat-açpa, aux chevaux rapides.
Cathwar-açpa, aux quatre chevaux, ce qui doit signifier monteur de quadrige.
Erez-açpa, aux chevaux rouge-clair.
Frin-açpa, aux chevaux aimant ou aimés, peut donc également signifier qui est aimé de ses chevaux ou qui aime les chevaux.
Hab-açpa, qui rassemble les chevaux, signifie peut-être possesseur d'un ou de plusieurs troupeaux de chevaux.
Haecat-açpa, aux chevaux bondissants.

Hit-açpa, à l'attelage de chevaux
Hv-açpa, aux bons chevaux.
Jam-açpa, sens inconnu.Kereç-açpa, aux chevaux minces, élancés, allongés.
Khshwiwra-açpa, aux chevaux rapides.
Pourush-açpa, aux nombreux chevaux.
Tum-açpa, aux forts chevaux.
Vash-açpa, qui parle aux chevaux, doit signifier qui dresse les chevaux à obéir à la parole.
Vir-açpa, l'homme aux chevaux.
Vist-açpa, aux chevaux rapides.
Yukt-açpa, aux chevaux accouplés.

Sauf Ardjat-açpa et Hit-açpa, tous ces noms appartiennent à des rois ou à des héros iraniens.

Ils sont une preuve de l'estime dont le cheval jouissait chez les Iraniens; et cette preuve est confirmée par le fait que ce peuple faisait traîner par des chevaux les chars de ses divinités.
L'Avesta en fournit de très nombreux exemples dont l'énumération serait fastidieuse; il suffira d'énoncer qu'ils se rapportent notamment aux divinités Ardwiçura, Ashivanuhi, l'Aurore, Çraosha, les Fravashis, Mithra et le Soleil

Parmi les sacrifices de chevaux et autres animaux, rapportés dans les yeshts V et IX précités, ceux qui sont faits sur le pic Hukairya par Yima et sur le Harabarezaiti par l'un de ses prédécesseurs, le premier roi iranien Haoshyanha, prouvent que les Aryas possédaient le cheval dès l'époque de leur séjour dans leur première patrie;
car le Harabarezaiti et son pic le plus élevé, le Hukairya, étaient situés dans la région orientale de l'Aryane primitive, et les temps antérieurs à Yima, ainsi que les commencements de la période historique à laquelle se rapportent les actes de ce personnage légendaire, appartiennent à l'époque de l'unité aryenne, [....]

Les sacrifices successifs, énumérés dans le Yesht V, ne prouvent pas seulement que les Aryas ont possédé le cheval dès l'époque de leur séjour dans l'Airyana vaedja; ils montrent aussi que les Iraniens l'ont emmené avec eux dans les provinces qu'ils ont successivement assujetties [....].

Ils montrent de plus que les peuples
anaryens qui leur ont disputé la possession de ces provinces avaient également des chevaux[....].

Ces sacrifices nous renseignent en outre sur un autre côté intéressant de la vie des Aryas et des Iraniens;

ils montrent que la viande, même celle du cheval, entrait pour une assez forte proportion dans l'alimentation de ces peuples, pendant toute la période connue des temps avestiques, c'est-à-dire depuis les règnes de Haoshyanha et de Yima jusqu'à celui de Vistacpa contemporain de Zoroastre.
C'est ce que l'on peut conclure des nombres d'animaux sacrifiés, bien que ces nombres, toujours les mêmes et disposés en séries décimales, puissent être purement fictifs.
[....]
Dans le Yesht VIII, 58-60, Ormuzd lui-même dit à Zoroastre :

« Que les contrées aryaques offrent des sacrifices en son honneur (de Tistrya)... qu'elles cuisent des viandes d'animaux de pacage, d'une couleur jaunâtre, brillante, et d'une couleur quelconque qui ressemble à celle de Hôma. Qu'il n'y prenne point part le meurtrier, ni le Janhika, ni celui qui ne chante pas les chants sacrés, qui répand la mort (dans le monde pur), qui combat la loi d'Ahura, de Zarathustra. »

Le Yesht X, 119, ordonne aux mazdéens de sacrifier à Mithra deux bêtes de pacage, deux bêtes de travail et deux oiseaux.
Enfin, dans le IVe chapitre du Vendidad, Ormuzd parle ainsi à Zoroastre :

«[....] Celui qui nourrit et développe (son corps) en mangeant de la viande obtient le bon esprit, bien mieux que celui qui ne le fait pas, etc. » (versets 134-145).


[....] on sait par les écrivains de l'antiquité que cette immolation est restée en honneur dans le mazdéisme tant que cette religion est restée florissante.

Piétrement 1882

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Revenant aux textes de l'Avesta, nous pouvons donc dire que, dès l'époque de leur séjour dans l'Aryane primitive, les Aryas étaient un peuple de guerriers fanatiques.

On a vu dans le Yesht V que Haoshyanha extermina un grand nombre d'étrangers infidèles, mais que c'est Yima qui fit perdre aux ennemis la puissance, la jouissance des biens, le bétail et toutes choses utiles; c'est à dire qu'il commença d'augmenter sérieusement l'étendue de l'empire aryen, comme le deuxième chapitre du Vendidad l'a montré plus haut.

L'allégorie de Takhma-urupa, prédécesseur de Yima, montrant Ahriman transformé en cheval (Yeshts XV, 10-13, et XIX, 29),
indique que les Aryas montaient déjà à cheval à cette époque, et plusieurs des documents précités montrent que, dès les temps avestiques, les Iraniens aussi bien que leurs ennemis anaryens attelaient et montaient les chevaux, tant pour les voyages que pour les combats.

Aussi la traduction des versets 29-31 du XVIIIe chapitre du Vendidad, dans laquelle de Harlez dit "500 cavaliers" au lieu de 1000 chevaux prétendant qu'il s'agit de 500 chars de guerre, nous paraît-elle très contestable; car il est très probable que les anciens Iraniens disaient quelquefois comme nous, 1000 chevaux au lieu de 1000 cavaliers. En tout cas, cette habitude existait certainement chez les anciens Hindous; la Râmâyana en fournit plusieurs exemples, dont deux seront rapportés dans le paragraphe suivant.

Il faut toutefois avouer que, si l'on en juge par le peu de documents zends qui nous restent, les chars de guerre paraissent avoir joué un plus grand rôle que la cavalerie proprement dite chez les iraniens avestiques.

Le nom zend du guerrier est même rathaesta, littéralement "qui se tient sur un char"; mais il doit avoir existé dans la langue zende d'autres noms du guerrier qui ne nous sont pas parvenus.
Peut-être aussi qu'ayant oublié le sens étymologique du mot rathaesta, les anciens Iraniens l'ont également employé pour désigner de véritables cavaliers;
de même que les Hindous védiques ayant oublié le sens étymologique de gôpati, garde-vaches, ont fini par dire açvânân gôpati, gardien de chevaux, expression qui se trouve déjà dans le Rig-Véda, et qui signifie littéralement garde-vache de chevaux, comme Pictet le fait remarquer dans ses
Origines indo-européennes, t. II, p. 42.

De Harlez rend généralement ce mot rathaesta par guerrier, et c'est encore ce qu'il aurait dû faire dans sa singulière phrase du yesth V, 52-55, où il est question d'Ardwiçura,

« à qui le rapide guerrier Tuça, le monteur de char, offrit un sacrifice sur le dos de ses coursiers, demandant la force pour ses chevaux. »

Il est évident que cette phrase ne rend pas le vrai sens du texte, qui est celui-ci:

" tâm yazata takhmo Tuço rathaestâro bareshaeshu paiti açpânâm zâvare; »
littéralement : « à elle sacrifia le vaillant Tuça le guerrier sur des hauteurs pour des chevaux la prospérité. »

II faut donc traduire ainsi la phrase en question:

"Honore Ardwiçura... à laquelle le vaillant guerrier Tuça sacrifia sur les hauteurs pour (obtenir) la prospérité de ses chevaux;"

c'est-à-dire pour la prospérité des chevaux de son corps d'armée.
La même observation est applicable à la phrase analogue du yesht X, 10-11, citée à la page 201 et qu'il faut traduire:

" Nous honorons Mithra... auquel les guerriers sacrifient sur les hauteurs pour (obtenir) la prospérité de leurs chevaux."

Le mot baresha signifie au propre hauteur, élévation, sommet, d'où le sens dérivé dos.

C'est évidemment le sens de dos qu'il faut attribuer à baresha dans le 21e verset du yesht VIII, puisqu'il désigne l'une des parties du corps du cheval Apaosha, au même titre que les mots gaosha (oreilles)et dîma (queue).

Mais il est tout aussi évident que, dans les passages précités des yeshts V et X, baresha conserve son acception propre de hauteur, élévation.
Non seulement notre traduction de ces derniers passages est justifiée par le texte, mais on sait par Hérodote (I, 131), par Xenophon (Cyrop., VIII, 1), et l'on vient de voir dans Strabon, que les mazdéens avaient coutume de sacrifier sur les hauteurs, sur les cimes des monts.
Il y a donc lieu d'être surpris que de Harlez et Spiegel se soient accordés à leur prêter l'habitude, au moins singulière, de sacrifier parfois sur le dos des chevaux.

Les yeshts IX, 28-31, et XIX, 86-87, donnent le titre de qyaonien à Ardjataçpa. On ne sait pas au juste où habitait le peuple des Qyaoniens ; mais, dans une note relative au yesht V, 107-110, de Harlez dit de Ardjataçpa :

« roi touranien avec lequel Vistaçpa eut sans cesse à combattre à cause de la réforme de Zoroastre. Ce fut lui qui s'empara de la ville de Balkh lors de cette invasion dans laquelle Zoroastre périt; »

et, à la page 443 de son Commentaire sur le Yaçna, Eugène Burnouf dit également que Ardjataçpa était un guerrier touranien.

Il paraît en effet que les Qyaoniens étaient une tribu des Touraniens, peuple que le yesht XIII, 38, et le Yaçna, XI, 21, appellent « ces ennemis aux mille chefs ».

Ce qui est certain, c'est que, sous le nom de Touraniens, l'Avesta paraît bien avoir désigné les plus redoutables et les plus constants ennemis des Iraniens, puisque ce nom reçoit l'acception générale de pillards, analogue à celle de notre mot vandales, dans ce verset 110 du XIIIe fargard du Vendidad :

« C'est moi Ahura Mazda qui ai créé le chien vigoureux contre le Touranien. »

Les Touraniens de l'Avesta ayant été souvent considérés comme des peuples septentrionaux, [...]

Mais le vainqueur d'Ardjataçpa étant Vistaçpa, dont la cour était à Balkh et dont l'empire s'étendait sur tout le Turkestan et sur le nord de la Perse, les domaines d'Ardjataçpa ne doivent pas être cherchés au nord du Turkestan, mais au midi de la mer Caspienne;
et c'est très probablement cette mer qui est désignée sous le nom de Vourukasha dans le passage en question; à moins que ce ne soit le lac Zareli et le lac Hamoun, qui ne formaient sans doute alors qu'une seule mer, ou même le lac Ourmiah. (note: Le nom de la mer Vourukasha, signifiantt aux rives étendues, doit avoir été donné par les Iraniens à plusieurs grands réservoirs d'eau, comme le nom d'Oued Kebir ou Grande Rivière est donné par les Arabes à plusieurs rivières d'Algérie; et, dans les notes de son Commentaire sur le Yaçna, p. XCV1I, Eugène Burnouf a déjà dit que la mer Vourukasha doit avoir quelquefois désigné dans l'Avesta le lac d'Aral, la mer Caspienne, " et quelquefois même le lac Zareh, dans le Sedjestan." )

C'est en effet vers le sud que se dirigeaient surtout les efforts des Iraniens; c'est dans cette direction qu'ils poursuivaient leurs conquêtes, qui furent poussées jusqu'aux rivages de l'océan Indien par les successeurs de Vistaçpa.

On doit donc en inférer que le Touran de l'Avesta était le pays situé au sud de l'empire iranien, et non au nord du Turkestan.
D'ailleurs, après avoir esquissé à grands traits, dans son Histoire ancienne des peuples de l'Orient, p. 452-456, la topographie de la Perse, de la Médie et de l'Arménie, et la conquête de ces pays par les rameaux aryens des Aryo-Perses, des Aryo-Mèdes et des Aryo-Arméniens,
M. Maspéro a déjà dit p. 457 :

« Les Perses ne paraissent pas avoir rencontré beaucoup de résistance; les peuplades koushites et touraniennes assez clairsemées qui habitaient entre l'Elam et la Garniame ne tinrent pas devant eux.
Les Mèdes durent conquérir pied à pied le sol de leur nouvelle patrie.
L'histoire a perdu le détail de leurs premières luttes contre les Touraniens; mais les traditions persanes ont conservé jusqu'au moyen âge le récit des exploits fabuleux qui les signalèrent et les noms des héros légendaires qui y furent engagés. »

Enfin le théâtre que nous assignons, non pas à toutes, mais à la plupart des guerres iraniennes de l'Avesta, explique bien pourquoi Vafrô navaza, compagnon de Thraetaona, sacrifia sur la Rângha ou sur le Tigre, comme on l'a vu [...]; et pourquoi Kereç açpa, prince du Sedjestan selon la tradition, sacrifia plus tard sur le même fleuve, pour vaincre le Gandarewa, suivant le yesht XV, 26-28.

On peut aussi inférer de ce dernier fait que la mer Vourukasha, dont le même Gandarewa désole les bords au yesht V, 36-39, n'est pas non plus la mer divine du Hara barezaiti, que c'est encore la mer Caspienne ou l'un des grands lacs précités;
et que le combat de Kereçaçpa contre ce Gandarewa est la lutte de Kereçaçpa contre une nation anaryenne de ces parages.
C'est-à-dire que l'Avesta donne le nom du démon Gandarewa à une nation anaryenne, comme il donne le nom du démon Azhi, le serpent, surnommé Dahâka, le mordeur, aux populations assyriennes adoratrices du serpent;
et le Râmâyana nous présentera le même ordre d'idées dans le paragraphe suivant.

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La connaissance des caractères différentiels des deux races chevalines asiatiques permet de compléter les renseignements fournis par la philologie sur le nom du héros iranien Kereçaçpa.

On a vu que ce nom signifie « aux chevaux minces, élancés », et l'on peut déjà en inférer que ce guerrier a possédé de tels chevaux.

Mais si l'on réfléchit, d'une part, que dans l'Avesta, notamment aux yesths V, 7, et VIII, 8, les épithètes « au corps de cheval » et « large comme un cheval » sont plusieurs fois employées dans le sens de "très large, très vaste";
et, d'autre part que l'ampleur de la poitrine et la largeur de la croupe sont précisément deux des caractères qui sont propres à la race chevaline aryenne et qui la distinguent de l'autre race chevaline asiatique, on en conclura certainement que Kereçaçpa dut son nom à des razzias de chevaux de race rnongolique pris à l'ennemi.

Le nom du héros anaryen Ardjataçpa contient implicitement l'énoncé d'un fait diamétralement opposé en ce qui concerne les Iraniens.
Ardjataçpa est en effet un nom purement iranien qui signifie le « gagneur de chevaux ».
Ce n'est donc pas le vrai nom du héros anaryen; c'est un surnom qui lui a été donné par ses ennemis les Iraniens, à cause des razzias de chevaux qu'il leur fit éprouver.

Les noms de Kereçaçpa et d'Ardjataçpa sont par conséquent aussi significatifs que celui d'Africain donné à Scipion et que celui de Germanicus donné a Drusus;
ils suffiraient à eux seuls pour montrer que, dès les temps dont parle l'Avesta, les Iraniens et leurs ennemis anaryens s'enlevaient déjà des chevaux, et que les premiers croisements des deux races chevalines asiatiques remontent a ces époques reculées, dans les régions où ces peuples se sont rencontrés. [....]

Piétrement 1882

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